L’UTILISATION DE LA PHASE DES ONDES RADAR POUR MESURER DES DISTANCES
Des nuages peuvent allonger le trajet du signal
ici, nous avons un exemple plus abstrait de variation de distance : l’une des images de la comparaison interférométrique (c’est-à-dire de la comparaison des phases de deux images radar) a été prise alors qu’un violent orage se préparait sur la zone observée. D’épais nuages s’étageaient sur plusieurs kilomètres d’épaisseur. Deux cellules de convection particulièrement actives sont indiquées par les flèches blanches sur l’image. Comme nous le savons, les ondes radar ne sont pas stoppées par l’atmosphère, même opaque, mais la vitesse de la lumière change selon le milieu qu’elle traverse. Cette vitesse, égale à 299 792 458 mètres par seconde dans le vide (les fameux 300 000 kilomètres par seconde), diffère d’environ un millième dans l’air, au point que la traversée de l’atmosphère équivaut à un allongement du trajet d’environ deux mètres. Les nuages (voir le schéma page ci-contre) peuvent ajouter un ralentissement supplémentaire, qui se traduit ici par une dizaine de centimètres en plus. En aller-retour, les quelque 20 centimètres supplémentaires se traduisent par une variation de phase correspondant à trois ou quatre longueurs d’onde du radar utilisé (l’instrument radar à bord du satellite ERS a une longueur d’onde de 5,6 cm). La possibilité qu’un même parcours puisse être vu avec une longueur différente du fait de la variation de la vitesse de la lumière ajoute parfois à la difficulté d’interprétation. Comment interpréter correctement ces mesures? Souvent l’information extérieure nous aide : on peut savoir qu’un tremblement de terre s’est produit ou qu’une zone possède un relief accidenté. On peut aussi apprendre qu’un orage avait lieu au moment de la prise de vue à l’aide des images des satellites météorologiques. Mais il existe aussi des moyens intrinsèques d’analyse d’une série d’interférogrammes. Chaque interférogramme est le fruit de la comparaison de deux images radar dont on connaît la date de prise de vue et la position orbitale exacte. Nous appellerons «intervalle» d’un interférogramme l’intervalle de temps compris entre les dates des deux prises de vue servant à le former. Si un motif particulier se retrouve sur tous les interférogrammes dont l’intervalle inclut une plage de dates donnée, et que ce motif ne se retrouve sur aucun autre interférogramme, alors il traduit une déformation du sol dont la date est incluse dans la plage en question. Si un motif particulier est systématiquement présent dans une série d’interférogrammes avec une amplitude en nombre de franges qui dépend de l’écart orbital des prises de vue propre à chacun de ces interférogrammes, il s’agira d’un résidu de relief. Enfin, si le motif est présent, avec la même amplitude, dans tous les interférogrammes qui ont une prise de vue en commun, il s’agira d’un effet météorologique présent à la date de cette prise de vue.
Contrairement aux systèmes optiques, qui recueillent leContrairement aux systèmes optiques, qui recueillent le rayonnement incohérent du Soleil tel qu’il est réfléchi par les objets du sol, un radar émet une onde électromagnétique artificielle dont la longueur d’onde est connue avec une grande précision. Lors du retour de cette onde, le radar mesure non seulement l’amplitude de celle-ci, qui renseigne sur la force du signal, mais aussi sa phase, c’est-à-dire «là où elle en est» dans sa vibration. Ainsi, si la phase au retour est la même qu’à l’émission, le trajet aller-retour de l’onde comprenait un nombre entier de longueurs d’onde. En revanche, si la phase au retour diffère de la phase à l’émission de 60° (on exprime la phase comme un angle, 360° représentant un tour complet), le trajet aller-retour de l’onde comprenait un nombre entier de longueurs d’onde plus un sixième de tour, ce qui peut indiquer que, par rapport au premier cas, la distance de l’objet observé a augmenté d’un douzième de longueur d’onde, en aller simple. Malheureusement la phase donne une mesure ambiguë de la distance, car elle ne dit rien du nombre entier de longueurs d’onde du trajet. Dans notre exemple nous ne saurons pas directement si la variation de distance de l’objet est d’un douzième de longueur d’onde ou si le trajet en aller simple a varié, en plus, d’un nombre quelconque de demi-longueurs d’onde.L’utilisation de la phase pour mesurer des distances dont de nombreux exemples sont montrés dans cet ouvrage est également ambiguë en termes d’interprétation. Les variation de phase mesurent pêle-mêle toutes les causes de variation de distance. Certaines sont liées à une différence de point : de vue stéréoscopique (voir page 48), analogue a la différence de point de vue angulaire de l’optique (voir page 46), d’autres sont liées à des déplacements de terrain. (voir pages 52 à 58), voire à des déplacements de « miroir » radioélectriques (voir page 106).